╍ contexte.    

{ AOÛT 1998 } Une douce nuit d'été, un bal grandiose au milieu des dorures du Palais des Princes de Monaco et... Un mystérieux gentleman dont le regard de velours faisait bondir mon cœur et frémir ma colonne vertébrale. Pourtant les hommes de la baie la plus glamour du monde étaient bien souvent loin d'être des princes charmants en dépit de leurs apparences qui tendaient à le faire croire. Derrière ces sourires ravageurs se cachaient généralement des démons aux égos destructeurs. Mais cette fois-ci, j'avais le sentiment qu'il en était autrement. Que j'avais trouvé la perle rare. Ses délicates attentions semblaient sincères et son caractère paraissait honnête et tempéré. Nous avions dansé des heures et des heures durant puis discuté plus longtemps encore. L'art, l'économie, la philosophie, la littérature ou encore les sciences en tout genre. Tous les sujets semblaient propices à nous rapprocher. Je dois bien avouer qu'en ce moment précis je n'ai qu'une seule hâte, celle de le revoir.

{ FÉVRIER 2003 } Voilà maintenant plus d'un an que nous nous étions unis grâce à ces anneaux dorés symbolisant notre amour. Le temps passé ainsi que la naissance de notre premier enfant avait bien sûr laissé place à une réalité qui s'était éloignée de la féérie de nos premiers émois. Toutefois en ce qui me concernait, je voyais l'avenir avec une certaine sérénité. J'avais tout ce que n'importe qui pouvait rêvé de posséder ; de l'argent, la sécurité, un homme sur qui je pensais pouvoir compter à toute épreuve et je venais d'être bénie par la maternité. Loin de moi l'envie de paraître prétentieuse mais je me sentais presque invincible. La vie me souriait et j'avais envie de lui sourire en retour. J'avais la douce sensation de vivre un véritable conte de fée. Moi, fille de bonne famille qui au début n'aspirait à rien d'autre qu'une carrière prometteuse, je venais de créer quelque chose de bien plus profond et abstrait que ça. Aujourd'hui j'avais une famille dont je devais prendre soin comme jamais.

{ SEPTEMBRE 2014 } Tout était tellement différent. Il me cachait des choses, je le savais. Étais-je assujettie à ses infidélités? Probablement. Était-il un homme corrompu? Très certainement. Mais n'ayant aucune preuve, je ne pouvais l'en accusé. Si seulement il n'y avait que ça. Il n'avait plus rien du prince charmant que j'avais eu la chance de rencontrer douze ans auparavant dans cette somptueuse salle de bal. Sa bonté et sa gentillesse s'étaient éteintes à petit feu. Il ne restait à présent rien d'autre que des cendres grisâtres et sans chaleur. Ou peut-être que ces dernières n'avaient jamais réellement existé. Peut-être que j'avais naïvement vu ce que j'avais souhaité voir. Ce masque charmeur qu'il avait tant de facilité à enfiler. Ma seule consolation restait mes enfants. Si je demeurais dans ce mariage qui semblait se distiller doucement dans une eau impure, c'était dans l'unique but de conserver leur stabilité et leur innocence. À vrai dire la peur de perdre la mienne était également omniprésente. Elle n'était néanmoins pas aussi importante.

{ NOVEMBRE 2020 } Je le détestais. Cet être abjecte qui ne se donnait même plus la peine de dissimuler ses travers. Il n'avait pas fauté avec une, deux ou trois femmes, mais probablement des dizaines ou des centaines. Aujourd'hui je pouvais le certifier puisque je l'avais vu de mes propres yeux. De surcroît, je ne supportais plus ce monde de faux-semblants dans lequel j'évoluais depuis plus de vingt ans. La magnifique demeure en guise de foyer, la grosse cylindrée synonyme de pouvoir, les amis puissants qui se félicitaient eux-mêmes d'être les 'maîtres du monde'. Ma beauté avait fané, mes perspectives s'étaient amoindries. Faire bonne figure en société n'était plus dans mes possibilités. Divorcer n'était pas une option car toute ma vie en ressortirait inévitablement détruite. Lui qui avait tant d'amis puissants. Les enfants étaient grands maintenant. Ils n'avaient plus besoin de moi. Je ne voyais qu'une seule issue possible ; réunir le plus de biens possibles afin de m'assurer une fin de vie confortable et disparaître sans prévention comme le ferait un mort quittant abruptement le monde des vivants. De toutes les manières, je l'étais déjà, morte. Mon esprit tout du moins. J'en avais la certitude à présent, les contes de fée n'existaient pas.